Dans l’enceinte historique du théâtre Molière de Mont-de-Marsan, un jeune homme de 18 ans vient d’accomplir un exploit aussi impressionnant que symbolique. Mohammed Belaaraj, élève en bac professionnel au lycée Robert-Wlérick, a remporté le premier concours d’éloquence organisé par la ville pour les étudiants et lycéens.

De zéro en français à champion d'éloquence : ce jeune de 18 ans va vous faire remettre en question vos excuses d'apprentissage !

Un parcours d’autant plus remarquable que ce talent de l’art oratoire ne parlait pas un mot de français il y a seulement quatre ans.

Un voyage inattendu

Né en Espagne près de Valence, Mohammed a grandi dans un environnement hispanophone jusqu’à ses 14 ans. Sa vie a basculé lorsque son père, d’origine marocaine, lui a annoncé une nouvelle qui allait tout changer : la famille déménageait en France. « Mon père nous apprend notre départ une semaine avant. Il a fallu rendre les livres à l’établissement scolaire. Dire au revoir aux copains… Je me suis dit que plus jamais je ne reviendrai en Espagne », a-t-il confié lors de sa prestation.

Arrivé en France à la rentrée 2020, en pleine période post-Covid, Mohammed s’est retrouvé face à un défi de taille : apprendre une nouvelle langue dans un nouvel environnement, avec toutes les difficultés que cela comporte pour un adolescent.

De débutant à champion

Quatre ans plus tard, ce jeudi 3 avril 2025, c’est dans la langue de Molière que Mohammed a conquis le jury et le public. « Je ne réalise toujours pas, mais je suis quand même fier », confie-t-il avec modestie après sa victoire. Sa révélation pendant le concours – « il y a quatre ans, je ne parlais pas français » – a saisi l’assistance et probablement contribué à faire pencher la balance en sa faveur.

Sa proviseure croit fermement en son potentiel : « Il le peut », affirme-t-elle, alors que le jeune homme espère maintenant intégrer une classe préparatoire aux grandes écoles. Son établissement l’encourage à poursuivre sur cette lancée prometteuse.

Les leçons d’un parcours inspirant

L’histoire de Mohammed nous offre plusieurs enseignements précieux pour tout apprenant d’une langue étrangère :

L’immersion totale accélère l’apprentissage.

Bien que difficile, être plongé dans un environnement où l’on doit utiliser la langue au quotidien constitue un puissant moteur d’apprentissage. Cette immersion forcée peut transformer une nécessité en passion.

La motivation personnelle fait toute la différence.

Au-delà des méthodes et des outils pédagogiques, c’est souvent la détermination individuelle qui permet de franchir les obstacles. Mohammed n’a pas simplement appris le français pour survivre, il l’a maîtrisé au point d’exceller dans l’un des exercices les plus difficiles : l’éloquence.

Les difficultés peuvent devenir des forces.

Le déracinement et la confrontation à une nouvelle culture, bien que traumatisants, peuvent nourrir une résilience et une adaptabilité extraordinaires. Mohammed a transformé son expérience migratoire en récit personnel captivant.

L’apprentissage d’une langue est aussi un voyage identitaire.

S’approprier une nouvelle langue, c’est aussi adopter une nouvelle facette identitaire. En embrassant le français, Mohammed a enrichi sa personnalité multiculturelle, déjà nourrie par ses racines marocaines et son enfance espagnole.

La maîtrise de l’expression orale représente l’accomplissement ultime.

Au-delà de la simple communication, atteindre l’éloquence dans une langue étrangère témoigne d’une appropriation profonde et personnelle. C’est passer du statut d’utilisateur à celui de créateur.


Le parcours de Mohammed Belaaraj nous rappelle que l’apprentissage d’une langue n’est pas qu’une question de grammaire et de vocabulaire, mais une aventure humaine complète, transformatrice, qui peut mener à des sommets inattendus. Son histoire nous invite à persévérer face aux défis linguistiques et à voir dans chaque difficulté une occasion de grandir.

Ce jeune homme, qui a fait du théâtre Molière le lieu de sa consécration, incarne parfaitement cette citation de Nelson Mandela : « Si vous parlez à un homme dans une langue qu’il comprend, vous parlez à sa tête. Si vous lui parlez dans sa langue, vous parlez à son cœur. » Mohammed a appris à parler au cœur des Français, dans leur propre langue, et c’est peut-être là sa plus belle victoire.