Dans ce passage de « Le capitaine Fracasse » de Théophile Gautier, nous sommes transportés dans un paysage austère des Landes où se dresse le Château de la Misère, autrefois noble, maintenant délabré.

Texte en français : Le château de la misère

Le texte explore les éléments qui confèrent au Château de la Misère son caractère sinistre et désolé, tout en nous plongeant dans l’atmosphère mélancolique qui règne autour de cette demeure déchue.

Texte :

Sur le revers d’une de ces collines décharnées qui bossuent les Landes, entre Dax et Mont-de-Marsan, s’élevait, sous le règne de Louis XIII, une de ces gentilhommières si communes en Gascogne, et que les villageois décorent du nom de château.
Deux tours rondes, coiffées de toits en éteignoir, flanquaient les angles d’un bâtiment, sur la façade duquel deux rainures profondément entaillées trahissaient l’existence primitive d’un pont-levis réduit à l’état de sinécure par le nivelage du fossé, et donnaient au manoir un aspect assez féodal avec leurs échauguettes en poivrière et leurs girouettes à queue d’aronde. Une nappe de lierre enveloppant à demi l’une des tours tranchait heureusement par son vert sombre sur le ton gris de la pierre déjà vieille à cette époque.
De larges plaques de lèpre jaune marbraient les tuiles brunies et désordonnées des toits, dont les chevrons pourris avaient cédé par places; la rouille empêchait de tourner les girouettes, qui indiquaient toutes un vent différent; les lucarnes étaient bouchées par des volets de bois déjeté et fendu. Des nids d’hirondelles oblitéraient le falte des cheminées et les angles des fenêtres, et, sans un mince filet de fumée qui sortait d’un tuyau de briques et se tortillait en vrille comme dans ces dessins de maison que les écoliers griffonnent sur la marge de leurs livres de classe, on aurait pu croire le logis inhabité: maigre devait être la cuisine qui se préparait à ce foyer, car un soudard avec sa pipe eût produit des flocons plus épais. C’était le seul signe de vie que donnat la maison, comme ces mourants dont l’existence ne se révèle que par la vapeur de leur souffle.

TH. GAUTIER. (Le capitaine Fracasse, Charpentier, édit.)


Le Château de la Misère, tel que décrit par Théophile Gautier, incarne la décadence d’une époque révolue. À travers ses tours délabrées et ses toits couverts de plaques de lèpre, il nous rappelle l’éphémère de la grandeur humaine. Ce tableau sombre nous invite à réfléchir sur la nature changeante de la fortune et la vanité des biens matériels. En fin de compte, le Château de la Misère témoigne du déclin inéluctable des structures humaines, laissant derrière lui le témoignage silencieux de son propre naufrage dans le temps.

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