L’énallage est une figure de style qui consiste à échanger une forme grammaticale pour une autre, afin de produire un effet expressif. Elle permet de jouer sur les modes, les temps, les personnes ou les catégories grammaticales, apportant ainsi une certaine liberté et un style souvent plus vivant ou surprenant dans la langue.

Définition de l’énallage
L’énallage tire son origine du verbe grec alattein, signifiant « échanger ». Cette figure consiste à substituer une forme grammaticale à une autre, en modifiant par exemple le mode, le temps, le nombre ou encore la personne dans un discours. Cet échange grammatical peut avoir pour objectif de souligner une nuance affective, un effet ironique ou d’insister sur un aspect particulier de l’énoncé.
Exemples d’énallage
Voici différents types d’énallage avec des exemples illustratifs :
Énallage de temps
On substitue un temps verbal par un autre pour créer un effet particulier.
Exemple :
« Qu’est-ce qu’elle voulait, aujourd’hui, la p’tite dame ? »
(L’emploi du passé pour une situation présente introduit un ton familier et inattendu.)
Énallage de personne
Le changement de la personne grammaticale, comme passer du « tu » au « il ».
Exemple :
« Il a fait un bon gros dodo, mon bébé ? »
(On parle d’une personne présente à la troisième personne pour créer un effet attendrissant.)
Énallage de mode
Le changement du mode verbal, par exemple en passant de l’indicatif à l’infinitif.
Exemple :
« Ainsi dit le renard, et flatteurs d’applaudir. »
(L’infinitif « applaudir » remplace un verbe conjugué pour donner une dimension intemporelle ou générale à l’action.)
Énallage de catégorie grammaticale
Un adjectif ou un nom est utilisé à la place d’un adverbe, ou inversement.
Exemple :
« Boire cul sec »
(L’adjectif « sec » est utilisé comme un adverbe pour qualifier l’action de boire.)
Un exemple célèbre d’énallage
Dans la phrase
« C’est dire que je me méfie atroce ! »
de Louis-Ferdinand Céline (Guignol’s band, 1944), l’adjectif « atroce » est utilisé à la place de l’adverbe « atrocement », accentuant ainsi le caractère dramatique et expressif de la méfiance.
Le rôle de l’énallage
L’énallage joue un rôle clé dans la modulation de l’expression. Elle permet d’apporter :
Un effet de surprise :
Le lecteur ou l’auditeur est souvent pris au dépourvu par cette rupture grammaticale.
Une touche affective :
Elle exprime souvent une intensité émotionnelle, comme l’ironie, l’humour ou la tendresse.
Une flexibilité stylistique :
Elle rend le discours plus vivant et peut refléter une manière de parler propre à certains personnages ou situations.
L’énallage est une figure de style subtile, souvent employée pour jouer avec la grammaire et déstabiliser l’interlocuteur par des changements inattendus dans la construction des phrases. Ce procédé permet d’enrichir l’expression et d’apporter une dimension affective ou ironique au discours.